Matthieu Gualino
Directeur, LAM LHA
News
December 7, 2021

Quelle gouvernance de la sûreté du transport aérien en 2022 ?

Vingt ans après les attentats du 11 Septembre, les décideurs – qu’ils soient publics ou privés, ont appris du passé et tentent de développer une approche différente en matière de prévention des actes malveillants. Le paradigme d’une sûreté reposant pour les acteurs publics sur la prescription d’un corpus réglementaire, et consistant pour les opérateurs, en la recherche de la conformité vis-à-vis de ces normes, tend à se fissurer. Sans parler d’une remise en cause de la règlementation en vigueur, il est possible de constater quelques évolutions dans la gouvernance internationale de la prévention des actes d’intervention illicite.

Tout d’abord, la sûreté se gouverne désormais sur la base d’une évaluation du risque. Un des premiers indices nous permettant d’émettre cette hypothèse est l’intégration par l’Organisation de l’Aviation Civile Internationale (OACI), depuis le début des années 2000, de la notion de risque dans la définition de sa propre politique en la matière. De manière concrète, l’organisation promulgue chaque année un « Risk Context Statement » (RCS) qui liste les scénarios de la menace et les score sur la base d’une évaluation de la menace, des conséquences et des vulnérabilités. En outre, certaines normes et pratiques recommandées incluses dans l’annexe 17 s’entendent désormais « sur la base d’une évaluation du risque menée par l’autorité compétente ». L’approche par le risque n’a pas pour objectif de diminuer le niveau de sûreté, mais vise à l’adapter. Cette approche se retrouve dans notre règlementation européenne. Par exemple, le règlement (UE) N° 1254/2009 de la commission du 18 décembre 2009 fixant les critères permettant aux États membres de déroger aux normes de base communes en matière de sûreté de l’aviation civile et d’adopter d’autres mesures de sûreté, autorise les États membres à déroger aux bases communes pour une liste d’activités, « sur la base d’une évaluation locale des risques ».

Au-delà de l’approche par le risque, depuis l’an passé, la sûreté cherche à se diffuser au plus grand nombre. Ainsi, l’année 2021 a été déclarée « année de la culture sûreté » par l’OACI. En lien avec la menace interne, mais également à la lumière des derniers évènements liés aux intrusions en partie critique des aéroports, l’idée que toute la communauté aéroportuaire puisse contribuer à la prévention de la malveillance est désormais envisagée comme une solution. Aussi, la mise en place d’initiatives visant à mieux faire connaitre la sûreté, mieux détecter les situations anormales tout en promouvant la culture juste, font que la prévention des actes malveillants devient une problématique commune. Cette promotion de la sûreté passe par la mise à disposition de supports de formation par l’OACI, et l’implication des États membres dans la valorisation de ce sujet auprès de tous les acteurs de l’aérien.

Dans la lignée de ces nouveautés, la gestion de la sûreté s’envisage également différemment chez les opérateurs. Loin des concepts post 11 septembre, la sûreté est désormais valorisée par l’implication grandissante de la hiérarchie des plateformes aéroportuaires et compagnies aériennes dans le processus décisionnel. La sûreté devient un bien commun qu’on valorise. Les écarts et non-conformités mal résolus ou qui deviennent récurrents sont analysés « à tous les étages » par un meilleur processus de remontée de l’information. L’ensemble de ces progrès sont rassemblés autour d’un outil qui tend à appréhender la sûreté de manière systémique : il s’agit  du système de management de la sûreté (SEMS en anglais). Ce management basé sur le risque intègre les grands principes que nous venons de citer et cherche à améliorer l’efficacité globale de la réponse apportée.

Si la sûreté reste « l’affaire de tous », elle demeure un sujet évolutif et changeant. Elle requiert adaptabilité et motivation. Donnons-lui les moyens de se rependre, se développer et s’affiner.

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